Page 91 - Un bout de crayon - Francis Leclerc
P. 91
Joseph Freymann reçoit à Strasbourg cette lettre de Francis datée du
28 octobre 1945.
« Mon cher Joseph,
J’ai lu plusieurs articles dans les journaux relatifs au rapatriement
des Alsaciens-Lorrains de Russie. Je ne doute pas que tu es parmi
ceux qui ont eu le bonheur de revoir la France et leur famille.
La bonne amitié qui nous unissait à Tambov a fait que j’ai bien
souvent pensé à toi depuis mon retour, et je voudrais maintenant
avoir de tes nouvelles, écris-moi vite et raconte-moi un peu ce qui
s’est passé dans le camp depuis mon départ. Notre abbé Haegeli
est-il rentré aussi ? Et Gégène et ceux de notre équipe du théâtre,
tu me diras s’ils ont tous revu la France.
Quant à nous, nous avons séjourné plus de deux mois à Odessa,
nous y étions bien, mais les bateaux ayant été supprimés, après
un voyage de 18 jours par le train, nous sommes arrivés à Paris
et le lendemain j’arrivais devant les ruines de ma maison. J’ai été
heureusement immédiatement renseigné où se trouvait ma femme.
J’espère que tes parents ont bien reçu le petit mot que tu m’avais
remis pour eux, je l’ai transmis immédiatement dès mon arrivée
en France.
Te voilà maintenant redevenu civil après ce cauchemar et tu conti-
nues sans doute tes études, il faut espérer que maintenant nous
aurons une très longue période tranquille.
J’espère bientôt te lire, et en attendant reçoit mon cher Joseph,
l’expression de ma bien sincère amitié. »
Cette lettre me sera restituée par Joseph Freymann en 2010 au début
de nos échanges.
- 91 -