Page 70 - Un bout de crayon - Francis Leclerc
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plusieurs choix et semblent avoir hésité ; le voyage s’oriente d’abord
            vers le Nord jusqu’à Sokol du 24 novembre au 18 décembre. Comme
            pour aller à Mourmansk en vue d’un embarquement vers l’Europe de
            l’Ouest en contournant la Norvège.
            Mais en plein hiver cet itinéraire est risqué avec la neige et le gel. Les
            gares sont rares avec la difficulté de s’approvisionner en eau et surtout
            en bois. Le train doit s’arrêter en forêt pour refaire la réserve de bois
            pour la chaudière. C’est sans doute la principale raison expliquant
            l’arrêt puis le changement de destination.


            Le 18 décembre ce sera finalement un demi-tour vers le Sud ; ils
            atteignent Yaroslaw le 24 veille de Noël 1944.
            Georges Léonard écrit : « Triste veillée de Noël dans un wagon. L’un
            des nôtres Pierre Durozoi, entonne le Minuit chrétien repris par tous.
            Peuple à genoux, attends la délivrance. » Or Pierre Durozoi est un
            ami de mon père. Cela confirme que Georges Léonard et Francis se
            connaissaient comme voisins de fermes et se trouvaient dans le même
            wagon. Francis évoquera cette même scène dans une lettre à son ami
            Joseph Freyman en janvier 1946 :

               « J’ai passé un Noël (1945) charmant en famille, quand je pense
               au précédent passé dans un wagon à bestiaux à Yaroslaw dans les
               voies de garage où nous stationnions depuis 4 jours. »

            Avoir laissé ainsi en plein hiver russe un convoi de wagons à bestiaux
            rempli de soldats alliés pendant 4 jours dans une gare, sans assistance
            est contraire à toutes les conventions internationales.
            Et après ce fut pire encore.




            Tambov

            Le train atteint Tambov le 2 janvier 1945. Le camp de Tambov est
            situé en forêt de Rada à proximité de la ville. Les baraques ont la
            particularité d’être enterrées pour mieux résister au froid. D’où le
            nom de « Camp des taupinières »  Il abritait les « Malgré-nous », ces
            Français alsaciens et lorrains incorporés par contrainte dans l’armée
            allemande. Considérés par les Russes comme des ennemis ils étaient
            déjà emprisonnés ici à l’arrivée des prisonniers « de 40 » Tous ces



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